vendredi 9 août 2019

Saint Vincent : Chateaubelair

La panne

Drapeau de St Vincent et les Grenadines

Le canal entre Sainte Lucie et Saint Vincent est soumis à de forts courants et parfois de grosses vagues. A la sortie de la Soufrière on remonte le courant plein Est pendant une heure avant de bifurquer plein Sud vers Saint Vincent. Le vent tourne plusieurs fois et finit par tomber en plein milieu du passage. On démarre le moteur. Au bout de 20 minutes, le moteur s'emballe. Je réduis les gaz, dé-enclenche la marche avant puis ré-enclenche la vitesse. Le moteur retrouve son régime normal. Etrange, on aurait dit que la marche avant s'était dé-embrayée. L'aurais-je mal enclenchée ?

Le vent revient, on remonte les voiles et on coupe le moteur pour le reste de la traversée. Un bon vent nous pousse vers le Sud, et l'on sent qu'un courant nous accompagne : la vitesse d'Unavoq monte à 6,5 nds, ce qui est une bonne moyenne. Normalement, avec 12 nds de vent, on se déplace à 5 nds.

Le ciel est chargé pendant la traversée
Au fond les 2 pitons de Sainte Lucie
A l'approche des côtes, soudain le vent cesse, et l'on re-démarre le moteur. Et là, le moteur cale quand j'enclenche la marche avant. Je remets au point mort, et j'enclenche la marche arrière. Puis j'essaie à nouveau la marche avant. Même résultat, le moteur cale. Nous avons l'impression que l'hélice est bloquée. Aurions-nous pris un filet ou une ligne flottante dans l'hélice ? Pourtant, au point mort je peux tourner l'arbre d'hélice à la main. Cela me semble grave comme incident. Au troisième essai, boite au point mort, le moteur ne démarre plus : catastrophe, il semble que la boite de vitesse se soit bloquée.

Les forts courants et la proximité de la côte nous poussent à agir rapidement. On décide de mettre l'annexe à l'eau (elle était sur le pont avant), puis de monter le moteur 6 cv qui lui était à poste sur le balcon arrière. Souci, il y a des vagues de 1,5 m qui nous arrivent par derrière. C'est acrobatique, l'annexe est soulevée alors que le moteur est fixe par rapport au bateau. Impossible de monter le moteur facilement depuis l'arrière. On déplace l'annexe à couple (sur le coté bâbord, coté de la terre pour bien voir les obstacles) puis on descend rapidement le moteur entre 2 vagues. 

Ouf, au second essai, on est synchro entre Patricia et moi, et le moteur se place sur le tablier arrière de l'annexe. Une amarre relie les 2 embarcations, et l'on démarre le 6cv. 

Unavoq pèse environ 15 tonnes en charge, et notre annexe 36 kg à vide. Avec le moteur, la nourrice pleine et une personne à bord, on arrive à peine à 150 kg. Au début Unavoq bouge lentement, puis petit à petit il prend de la vitesse. On arrive finalement à 3 nds, ce qui est amplement suffisant pour rentrer dans la baie de Chateaubelair face au vent.

A couple, barre moteur 6 cv coincée
je suis devant pour équilibrer l'annexe
Mouillage de Chateaubelair
8 m de fond devant les cocotiers
Une fois au mouillage, on décide de trouver un mécanicien pour confirmer la panne. Diagnostique du mécano : plus aucune huile dans la boite, boite bloquée et impossible pour lui de réparer. Je prends le taxi collectif pour aller à Kingstown, la capitale de Saint Vincent. L'idée est de chercher un mécano et des pièces. Au chantier naval, situé à Hottley Hall, impossible de trouver un mécano : il y en a un, mais son planning est surchargé. Il faut dire que le chantier vient de rouvrir, ils sont encore dans les inventaires... Par contre, le patron me trouve un mécano chez un charter à Blue Lagoon, de l'autre coté de Kingstown. Virgile de Barrefoot Yackt Charter peut me prendre la semaine suivante. 

Souci : comment venir en bateau à Blue Lagoon sans moteur, sachant que le long des côtes est dangereux (nombreux rochers), sans vent et avec des courants forts ? Nous risquons d'abîmer l'annexe en forçant l'allure pendant 4-5 heures de navigation. Cette annexe est importante pour nous ; c'est notre unique moyen de communication avec la terre et un bon secours en cas de panne. Il nous faut la ménager.

Le Remorquage

Un premier contact avec les pêcheurs du coin nous permet d'essayer de négocier un remorquage jusqu'à Kingstown. Mais le pêcheur intéressé est gourmand, il en veut 1000 EC plus les frais d'essence, soit 300 EC de supplément. Cela représente 430 € au total. On trouve l'addition trop salée, aussi on renonce. Le lendemain, un autre pêcheur, à qui on avait donné un masque de plongée la veille, nous met en contact avec un de ses amis. C'est un jeune pêcheur a qui nous proposons 300 EC (100 €) pour la journée de travail plus les frais d'essence. Il trouve cela correct, et il nous prend en charge. 

On utilisera notre amarre de 50 m en gros diamètre pour le remorquage. Il ne veut pas se mettre à couple, aussi on montera une patte d'oie sur sa barque et une autre sur Unavoq. L'amarre est assez souple pour amortir les chocs, et assez longue pour que la barque reste stable. Ses 40 cv de moteur deux temps suffisent pour nous lancer, nous ferons une moyenne de 3 nds sur 5 heures malgré les courants et le vent contraire. 



Le pêcheur se fait appeler "Marley" (prononcer Marlie à l'anglaise), de son vrai nom Dammi Samuel. Pour les voileux qui s'arrêtent à Chateaubelair, n'hésitez pas à le rencontrer. On a apprécié l'utilisation de nos Talkies Walkie durant le remorquage : ils nous ont permis de garder le contact avec le pêcheur malgré les bruits de son hors-bord.

Le long des belles côtes de St Vincent

Arrivés à Blue Lagoon, la seconde baie après Kingstown, nous mouillons juste devant le ponton de Barrefoot Yackt Charter dans 3m d'eau. La réparation se fera à flot, une première pour nous.

Le ponton de Barrefoot est au pied de la maison aux volets jaunes à droite

La Réparation

Le presse étoupe à droite
L'arbre d'hélice à gauche
Pour la petite histoire, c'est la première fois que je recule l'arbre d'hélice alors que le bateau est dans l'eau. Le presse étoupe (qui empêche l'eau d'entrer dans le bateau en longeant l'arbre) n'a pas à être touché, on tourne juste lentement l'arbre à la main pour reculer l'hélice. Cela libère la place pour reculer la boite de vitesse et la sortir.



La boite de vitesse
sortie avec Virgile le mécano


Virgile démonte la boite

A l'aide d'une presse il sort les engrenages 
J'aurais du contrôler le nivaux d'huile, car sans huile les roulements sont bloqués et les disques de la "crapaudines" sont usés. Il faut donc changer : les roulements, les joints et les disques.

L'addition coûte plus de 1000 € rien que pour les pièces, ajouter 500 € de main d'oeuvre et des réglages délicats avant de pouvoir remonter la boite. On opte rapidement pour remplacer la boite par une boite d'occasion. Une première boite nous est proposée par un local, mais le niveau d'huile est insuffisant et l'on craint qu'elle ne fuit. Faudrait pas avoir à la re-démonter la semaine suivante, vu le travail que cela demande.

J'en trouve deux autres identiques au Marin en Martinique chez Mécanique Plaisance. Dream Yackt Charter accepte de nous l'apporter gratuitement en fin de semaine car ils ont des clients qu'ils emmènent à St Vincent. Coût de la boite d'occasion : 400 €.

Reste à la remonter, et ce n'est pas facile car sur 6 vis, les 2 du bas sont des goujons. On n'arrive pas à aligner le pignon de la boite quand les orifices en face des goujons sont encastrés. Virgile finit par enlever les goujons, et la boite rentre facilement. Il mettra 2 vis sur mesure pour remplacer les goujons. Coût de la main d'oeuvre pour m'aider : 350 € plus 150 € de prise en charge (hic). On s'en tire avec un addition totale de 900 € ; nos économies en prennent un coup. Cela fait cher le litre d'huile oublié...

Bilan : 

Nous avons ajouté un contrôle avant chaque départ au moteur. On fera donc :

- le niveau du liquide de refroidissement
- le niveau d'huile moteur
- le niveau d'huile de la boite de vitesse

Deux litres d'huile spéciale boite automatique viennent s'ajouter au stock des réserves.


La nouvelle boite remontée
A gauche le cul du moteur
A droite l'arbre d'hélice et le presse étoupe
Le gros tuyau au milieu est l'échappement
En bas, les tuyaux rouge et bleu forment le refroidissement par eau de mer de la boite

Après 15 jours de panne l'aventure peut continuer, nous repartons pour le Sud destination l'ile de Béquia d'où nous écrivons ces lignes.



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