vendredi 22 juin 2018

Pavillons

De l'usage des pavillons 
Pavillon Q

Cet article parle d'étiquette, c'est à dire autant de politesse que de drapeaux 😲
  • Politesse car lorsque l'on arrive en pays étranger par la mer, notre navire représente un peu la France du fait du drapeau français qui y flotte.
  • Drapeaux, car comme sur un bon fromage, les bateaux sont étiquetés par un pavillon qui indique l'origine administrative. Notez que le "pavillon" est le nom donné aux drapeaux dans la marine.

Le protocole

Nous naviguons sur un navire portant 2 mats (on dit gréé Ketch), aussi nous devons porter les pavillons comme suit :
  • Sur l'artimon (le petit mat situé à l'arrière d'un Ketch) ce sera le pavillon français. Il y a une potence spéciale à Tribord qui permet d'envoyer le pavillon en tête de mat.
  • Sur le grand mat, à tribord ce sera le pavillon de courtoisie. C'est le drapeau du pays que l'on visite, il doit être plus petit que le drapeau Français. Une poulie sous la barre de flèche permet d'envoyer ce pavillon jusque sous la fixation de la poulie.
  • Sur le grand mat, à bâbord ce sera le pavillon de demande de libre pratique. C'est un drapeau tout jaune, aussi appelé pavillon Q car il représente la lettre Q comme "quarantaine" dans l'alphabet des pavillons. Ce pavillon est envoyé quand vous demandez à faire les démarches administratives d'entrée dans un pays. On ne peut faire ces démarches que dans certains ports.
La politesse en mer, c'est aussi le respect des traditions séculaires. Par exemple, on ne doit pas laisser à poste un pavillon sur un pataras (câble qui tient le mat à l'arrière du bateau), ni mettre deux pavillons sur la même drisse (cordelette qui permet de monter le drapeau). Mettre ainsi deux pavillons superposés est considéré comme offensant pour le pavillon du dessous ....

Le pavillon se hisse de jour, et se rentre la nuit.

Les jours de fête nationale, on porte un grand pavillon français sur un petit mâtereau à l'arrière du navire.

Note :
Le pavillon A se hisse pour signaler qu'un plongeur appartenant au bateau est immergé
Les pavillons N et C se hissent pour signaler un état de détresse.

Alphabet des pavillons

Ajout de 2021 : Nous naviguons maintenant sur un catamaran, aussi nous portons le pavillon à la poupe de notre nouveau navire, sur un mâtereau légèrement incliné vers l'arrière. Le pavillon de courtoisie est quant à lui toujours porté à tribord sur une drisse du grand mât, et le drapeau Q à bâbord, de l'autre coté du grand mât.


En terme juridique

Le terme de "pavillon" porte deux sens :
  • Le premier est matériel, c'est le drapeau du pays porté par le navire
  • Le second est juridique, il désigne la nationalité de rattachement du navire, celui où il est immatriculé
C'est une particularité du droit maritime où le statut juridique est défini par la nationalité du navire et non par la nationalité de son propriétaire. En haute mer, vous êtes soumis à la juridiction française si vous battez pavillon français, quelque soit la nationalité du capitaine ou des équipiers : c'est comme un petit bout de la France qui se promène autour du monde.


Note : La réglementation en vigueur est la convention de Genève du 29 avril 1958 et la convention internationale sur le droit de la mer dite de "Montégo Bay" de 1982. 
Dans la nouvelle Division 240 entrée en vigueur le 6 mai 2019, il est stipulé que le pavillon national doit être porté en dehors des eaux territoriales.


mercredi 20 juin 2018

Vieille Singer

Du Métier de tailleur

Le projet de voyage en voilier a cette particularité de nous permettre d'aborder tous les métiers liés à la navigation. Nous ne sommes pas millionnaires (non non, je vous assure, je ferai un article sur le coût du projet et vous serez surpris), aussi nous réalisons par nous même le maximum de travaux à bord.

Un des métiers auquel je ne m'attendais pas à bord était celui de tailleur / couturier. Génial. En effet, il se trouve que lorsque j'étais petit, je passais des heures à régler les vielles machines à coudre de la maison. Ma grand mère maternelle, que je n'ai pas connue, était couturière et nous avait laissé 2 Singer à pédale dont une électrifiée en 220 V.
La grand mère fabriquait des soutiens gorges dans les années 30-40. Ma mère me disait, d'un air plein de sous-entendus, qu'elle était "aux pièces"; je compris plus tard que cela signifiait qu'elle était payée en fonction des pièces réalisées, et que ce métier était ingrat et donc non désirable pour ses fils...

Petit, je jouais des après-midi avec les cannettes "obus" ou les cannettes verticales des 2 vielles Singer de la maison, et plus tard je réalisais avec tous les tissus qui me tombaient sous la main, un sac de sport en Jean, un chapeau en cuir souple, des trousses, des aménagements pour mes pantalons (ronds de cuir, ouverture sur les mollets, changement de taille...)...

Réalisation d'un taud

Quand nous avons acheté notre voilier, il était équipé  d'une casquette (protection rigide du cockpit en aluminium) et d'une tente d'hivernage complètement fermée. Le derrière de la tente s'enlevait, mais du coup il n'y avait plus de protection contre le soleil et la pluie.

Casquette et devant de la tente du cockpit
Capote d'hiver posée

Nous décidâmes donc de réaliser une nouvelle partie arrière de la tente afin de pouvoir l'utiliser en navigation. En gros, on conserve la forme, mais on créé des ouvertures sur les cotés et à l'arrière.
Du coup, nous avons creusé le sujet de la couture sur voile.

Ce que nous avons appris :
  • La toile de tissus "spécial marine" n'est pas très épaisse, mais elle est difficile à transpercer. (Nous avons choisi la marque Sunbrella, très résistante aux UV).
  • Notre machine moderne spéciale Jean (une Toyota Oekaki ) n'arrive pas à coudre plus de 2 épaisseurs de tissu marine : elle manque des points ; en fait elle n'arrive pas toujours à crocheter le fil par en-dessous et la tension du fil n'est pas assez forte (le point ne se fait donc pas au milieu du tissu comme il faudrait)
  • Il faut des aiguilles solides mais qui ne coupent pas (ne pas prendre des aiguilles spéciales cuir sinon cela abime le tissu). Nous avons essayé du 90, du 100 et du 110. Cette dernière passe bien.
  • Il faut un fil spécial resistant aux UV : c'est un fil trois brins de référence V92
  • Il faut une machine à coudre avec un pied de pression et un réglage de tension de fil très fort. Le fil V92 est gras au toucher, et difficile à tendre.
  • Enfin, l'astuce qui vous sauve la vie : utiliser du scotch double face pour coudre. Cela a 2 effets intéressants.
    • En premier, cela permet de tenir les tissus à coudre quand vous n'avez pas de pied à double entrainement (c'est un pied qui "marche" sur le tissu et fait donc avancer le tissu par dessous et par dessus).
    • En second, cela permet d'étanchéïfier les coutures. Sur mes tentes d'expédition, j'avais remarqué que l'étanchéité était obtenue avec des fils en coton qui gonflaient à l'humidité. Ici le fil est polyester et ne gonfle pas.
Comme je n'avais plus les machines de grand mère, bêtement données il y a longtemps, nous avons vainement parcouru les vide-greniers du coin pour en trouver une. En passant par hasard chez Emmaüs, nous avons rencontré une bénévole qui nous a vendu pour 30 € une Singer type 15-90 des années 50, montée en 110 V.  Particularité de cette machine lourde de 25 kg : bien qu'elle soit en fonte, elle est proposée dans une valise de transport (nous l'emmènerons donc à bord !).

Après plusieurs tests, nous avons réussi à coudre 8 épaisseurs de Sunbrella. Du coup, la machine a été  complétée d'un nouveau moteur en 220 v et d'une nouvelle lampe.

Note : Ce modèle de machine ancienne ne réalise que des points droits, et non des points zigzags. Pour les voiles, cela limite donc les réalisations  de  réparation temporaire, car une couture zigzag est beaucoup plus solide lors des déformations des tissus.

Moteur 220v en blanc et lumière télescopique


Pose du galon pour terminer proprement la découpe en bordure
Scotch double face & couture de la fermeture éclaire principale
Capote et salle à manger squattée...

Détail de couture

Bâti réalisé en scotchant une toile plastique
 directement sur les barres de fixations de la capote
Ajout Novembre 2019 :

En 2019 nous avons amélioré la Singer afin de pouvoir coudre sans électricité. Il s'agit d'ajouter une manivelle et de changer le volant que fait tourner le moteur. Il faut un volant ajouré et non plein pour le mécanisme manuel. Ces mécanismes s'achètent neuf sur le net (20€), mais ils ne sont pas de bonne qualité sauf pour les modèles Singer qui sont beaucoup plus cher.

Nous avons donc chercher des veilles machines bradées à 20 € sur leboncoin. Elles sont rouillées, inutilisables pour la plupart, mais ce mécanisme est souvent fonctionnel. Bingo, à 15 € nous avons trouvé une telle machine, et aujourd'hui nous cousons tout avec cette manivelle tant le mécanisme est fluide et la machine facile à utiliser.

Le mécanisme se fixe à la place du support moteur que l'on doit retirer

La manivelle peut se replier pour ranger la machine


Détail du mécanisme qui se règle entre les rayons du volant

Le métal est un peu piqué, mais fonctionne parfaitement




lundi 18 juin 2018

AIS

Introduction

Qu'est-ce qu'un AIS ?
C'est un acronyme : AIS = Automatic Identification System
Notre AIS installé,
noter le mode furtif
utilisable avec un simple
interrupteur

En français cela donne Système d'Identification Automatique 

C'est un système de radiocommunication numérique par ondes VHF (ou VDL pour VHF Data Link) destiné à l’échange automatique d’informations entre stations fixes et/ou stations mobiles tels que :

–  les navires ;
–  les stations côtières ;
–  les aéronefs impliqués dans des opérations de sauvetage.

Pour simplifier, comme chaque émetteur AIS émet sa position, sa direction et sa vitesse en temps réel, un calculateur  peut vérifier les trajectoires des navires en mer et donc déterminer s'il y a un risque de collision. L'AIS donne aussi des informations sur le type de navire, sa taille, sa cargaison, son pavillon, son nom, son MMSI ...


Composition d'un AIS :


Idéalement, l'installation d'un AIS est composée de 4 éléments physiques distincts (cf. norme CEI 61993-2)
  •       un transpondeur radio VHF c’est à dire un émetteur et un récepteur
  •       une unité de contrôle et de visualisation
  •       un récepteur GPS (en fait une antenne GPS dédiée) obligatoire *
  •       une antenne VHF dédiée
* La station AIS Intérieur doit comporter un récepteur GNSS interne en tant que source UTC pour le propre positionnement, COG et SOG. Le récepteur GNSS interne doit être conforme aux spécifications correspondantes de la série de normes internationales CEI 61108 telles que définies dans la norme CEI 61993-2. Le récepteur GNSS interne doit pouvoir traiter les données correctives différentielles depuis une interface dédiée RTCM SC-104 et via le message VDL 17.

Nota bene :
Tous les AIS ne sont pas "émetteur", dans ce cas on parle de "récepteur "AIS : c’est le cas des petits voiliers de plaisance pour qui le coût d’un AIS complet est prohibitif vis à vis de l’utilisation réellement faite.

De même, l’unité de contrôle et de visualisation peut se faire sur un traceur de navigation non dédié.
Enfin, on peut utiliser un splitter d’antenne VHF qui permet de partager la même antenne avec la radio VHF, en donnant la priorité à la voix. Nous n'aimons pas les splitters d'antenne, car ce sont encore des boitiers électroniques, donc un potentiel ni d'ennuis supplémentaire, ne serait-ce que pour la recherche de panne ou de signaux dégradés.


L’installation

Nos choix :

Nous avons choisi d’installer un transpondeur, c’est à dire un émetteur / récepteur. Plusieurs facteurs nous ont incité à choisir cette solution :

-     - Le coût, cela peut paraître étrange, car normalement le système est plus cher. Mais la baisse des prix de l’électronique permet de trouver des boitiers aux normes européennes de bonne qualité. Bien sûr, les coûts importants cachent en fait le prix de la main d’œuvre. Comme j’installe moi même les équipements, je ne paie pas l’installation.

-     - Le fait que l’on voyage à 2 sur des longues périodes : nous ferons chacun des périodes de quart à la barre, mais l’AIS sera pour nous une aide. Il signalera notre présence aux autres navires même si nous sommes incapables de les voir (fatigue, brume, nuit noire ou mer formée …)

-     - L’AIS permettra à nos proches de suivre notre parcours même durant les grandes traversées, car bien que l’émetteur soit petit, il permet quand même de transmettre aux gros navires que l’on croise, et eux ont l’obligation de relayer nos signaux à terre.

Une antenne VHF dédiée : là encore, notre choix est fait sur plusieurs critères.

-     - Nous naviguons sur un Ketch, c’est à dire un voilier portant 2 mats. Selon les normes de radiocommunication, il n’est pas souhaitable de positionner 2 antennes VHF à moins de 3 m l’une de l’autre. Sur un ketch c’est possible, car l’on met alors une antenne sur chaque mat.

(Ajout de 2020 : La navigation sur un catamaran n'a pas changé notre philosophie d'installation. L'antenne dédiée à l'AIS est maintenant fixée sur le portique des panneaux solaires à l'arrière du navire. De notre expérience, il n'est pas rare de voir l'antenne en tête de mât abîmée par un oiseau...).

-      - Le coût : cela nous a couté moins chez d’acheter une seconde antenne VHF qu’un splitter d’antenne.

-      - La sécurité : en cas de souci avec l’antenne principale du navire, la seconde antenne pourra servir de secours.

Certes, la hauteur du mat d’artimon est inférieure de 4 m à celle du grand mat qui culmine à 16 m. Mais c’est en fait un avantage plutôt qu’un inconvénient pour l’AIS : il a une portée moindre, environ 20 mn au lieu de 30 mn, donc moins de sollicitations sur des navires qui de toutes façons sont trop loin pour nous intéresser.

Pour l'antenne GPS dédiée, nous avons choisi de la positionner sur la table des cartes car notre navire est en polyester et l'on reçoit très bien les ondes GPS dans le carré.

Les connexions

Une fois le matériel choisi, l'installation est toujours simple dans le principe, mais compliquée dans la réalité...

Première complication : l'installation de l'antenne VHF sur le mat d'artimon

J'ai voulu réutiliser la fixation d'une ancienne antenne GPS car elle était solide et dans l'axe du mat. Il m'a fallu un après-midi pour la démonter et la percer à la taille du câble. C'est du costaud...


Deuxième complication : passer le câble VHF dans le mat

Notre expérience sur le grand mat nous a permis d'aller relativement vite ; on badigeonne le câble avec du savon liquide et l'on utilise un fil fin et solide comme guide. par contre, une fois passé le pont, le câble court jusqu'à la table des cartes par le plafond. Et là, galère de passer les fils tant il y en a.

Dernière complication : les tests

N'étant pas dans une zone dégagée, notre AIS ne passe pas très loin et n'apparaît pas du coup sur la carte en ligne (site Internet). Il fallu trouver un plaisancier équipé d'un récepteur pour pouvoir tester notre AIS. Cela nous a permis de voir qu'il ne fonctionnait pas... Retour au fournisseur et tests à nouveau. Tout est bien qui finit bien, mais quelle charge de travail... 



Ci dessus notre AIS avec l'antenne GPS en arrière plan.

Le montage


Si l'AIS possède bien des avantages, il a aussi un inconvénient : il donne votre position quand il émet. Non pas que vous soyez délinquant, mais vous ne voulez pas, par exemple, que des pirates puissent vous tracer dans certaines régions du monde. Je pense au Venezuela ou à la corne de l'Afrique. Ils ont des bateaux bien plus rapides que nous, et un navire isolé a bien du mal à leur résister. 

Plus retord, certains pays font payer de grosses sommes d'argent quand vous arrivez un samedi et que les bureaux ouvrent lundi. Je parle de 150 $ de frais supplémentaires sur la clearance. Le douanier regarde l'historique de votre AIS publié sur Internet, et sans même se déplacer, il facture, hardi petit ... Cela se passe comme ça en ce moment dans le sud des Caraïbes, le voyageur en tour du monde étant sensé être très riche, on le ponctionne avec les moyens du bord.

Pour ces raisons, j'ai installé un mode furtif. Il s'agit de couper l'émission tout en gardant la réception. Ci dessous, le switch de gauche permet la mise en marche de l'AIS, et le switch de droite permet d'éteindre l'émetteur uniquement. Une simple boite en bambou coupée en deux et le tour est joué. Reste a y penser le moment venu ...

Les 2 switchs de notre l'AIS


Astuces

Ajout de septembre 2022 : 

Pour ceux qui utilisent (ou veulent utiliser) le site de Marinetraffic ( http://www.marinetraffic.com), une astuce :
Normalement notre AIS émet la position de notre navire, et comme c'est une classe B+ (5W au lieu de 2W), Marinetraffic récupère la position que ce soit par une balise terrestre ou par satellite et l'affiche sur la carte mondiale.

Le hic, c'est que Marinetraffic fait maintenant payer les utilisateurs qui veulent voir les positions reçues par satellite.

Si vous voulez que vos amis vous suivent GRATUITEMENT sur le site, il y a une astuce : c'est de reporter soi-même sa position (par Iridium, BLU, Internet près des côtes... bref tout ce qui permet d'envoyer un courriel).
Pour ma part j'utilise la HF (BLU) avec Airmail et le réseau Winlink.

Le principe est simple, on envoie un mail à Marinetraffic avec sa propre position.

Le format est le suivant :

MMSI=123456789
LAT=-17,48197
LON=-149,8171
SPEED=0.1
COURSE=270
TIMESTAMP=2020-09-06 07:13

Attention : uniquement 4 décimales pour la longitude.
destinataire : report@marinetraffic.com
Sujet : ce que vous voulez.

La première fois, contacter le site de Marinetraffic via le formulaire Première Demande